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Posted by : Palabre-Infos 22 oct. 2011



Dans une interview qu'elle  a accordé GuineePresse (GP), Fatimatou Barry, parle de ce qu'elle a subit lors des évènements du 29 Septembre 2009 au stade. Membre du comité national des jeunes de l'UFDG, elle est actuellement livrée à elle même au Sénégal sans aucune aide ni de l'Etat guinéen encore moins du chef de sont parti qu'il a d'ailleurs rencontré dans un hôtel à Dakar. Lisez cet interview et voyer la rendez-vous compte de la barbarie que les guinéenne ont subit lors cet affreux évènement organisé par l'opposition.


GuinéePress (GP)
Bonjour Mlle Barry !
Fatoumata Barry (FB) :
Bonjour !
GP :
On m’a parlé de vous le 4 septembre à Bruxelles. On m’a parlé de vous le 18 septembre à New York. Alors à l’occasion du jour anniversaire du 28 septembre, on a décidé de venir vous voir et savoir comment allez-vous aujourd’hui. Pour commencer, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
FB :
Merci ! Moi je suis Fatoumata Barry. En Guinée, j’étais étudiante en 3ème année Economie à l’université de Hafia à Labé
GP :
On nous a conduits à vous en tant que victime des crimes de viols et de violences du 28 septembre 2009 au stade du même nom à Conakry. Comment avez-vous pu être victime à Conakry si vous êtes étudiante à Labé ?
FB :
J’étais venue en vacances à Conakry depuis le mois de juillet. L’événement m’a trouvé à Conakry. Etant militante de l’UFDG et membre du comité national des jeunes du parti, j’ai fait partie de ceux qui ont mobilisé les gens pour aller au meeting de l’opposition. J’y étais allée avec la fille de mon oncle paternel. On était à la tribune avec les leaders Cellou Dalein, Sidiya et Lounseny Fall.
GP :
Que s’est-il passé pour que vous qui étiez à la tribune avec les leaders soyez parmi les plus grandes victimes ?
FB :
Quelques minutes après l’arrivée de Jean Marie Doré qui a été soulevé par la foule, les militaires sont rentrés et ont commencé à tirer à balles réelles sur les gens. La première chose qui m’a frappée, c’est la présence de tous les corps de sécurité comme si l’ordre est venu d’en haut car ils ne sont pas tous sous le même commandement en principe: la police, la gendarmerie, les bérets rouges et l’armée régulière. A la tribune, 3 bérets rouges sont venus tirer des rafales sur nous. On voit des gens tomber sur la rangée en dessous de nous. Ma petite sœur crie et demande mon aide. J’ai alors prié des jeunes qui étaient avec nous de nous aider à sortir de là. Ces derniers nous firent entrer dans le tunnel qui mène vers dehors. Je laissai ma sœur aller en avant. Quand je m’introduis à mon tour, les militaires me rattrapèrent. On s’est retrouvé 2 filles et une femme âgée entre les mains du groupe qui nous a prises. On comprit vite ce qu’ils veulent faire: en face de nous, un autre groupe violait des filles sur la pelouse où l’on fait d’habitude la prière au stade. La femme âgée essaye de les supplier. Elle reçoit une terrible gifle. Ensuite on déchira les habits de la vieille. Un béret rouge utilisa son poignard pour déchirer la robe de la jeune fille suivant les contours de ses seins. Elle saignait en fonction de la progression de l’arme blanche. Soudain, on me terrassa moi aussi et deux agents se mirent à me déshabiller. Mon pantalon Jeans était dur. Alors ils m’écartèrent les jambes et plongèrent leurs mains dans mon slip. Ils arrachèrent ma culotte de sport puis mon slip que vous voyez à terre sous mon pied sur la photo. Sur la photo, vous voyez deux agents de corps différents me conduire sur le lieu de viol. Ils étaient nombreux et de corps différents mais tous passèrent sur moi sauf un seul, un militaire qui s’opposa plus tard qu’on m’embarque dans le camion transportant des corps.
Un policier, après m’avoir violée, se propose d’uriner dans ma bouche, comme si cela faisait partie de leur programme. Je reçus des jets d’urine sur tout le visage. Après, ils utilisèrent des bâtons pour me violer encore à l’aide de ces objets. Puis, pour finir, un essaya de me poignarder devant, sur la partie intime. Par un geste de reflexe, je me suis remuée faisant dévier l’arme qui se planta sur le côté, au niveau du rein droit. Voyez-vous la partie ? (Elle montre la trace du poignard). Le sang commença à couler et j’étais si épuisée que je ne pouvais plus crier ou pleurer. Alors ils me soulevèrent mouillée de sang pour me jeter dans le camion sur des corps.  C’est là qu’un militaire s’est opposé en disant que ce n’est plus la peine de faire ça avec moi. « Elle a déjà trop subi, ça suffit ! Laissez-la partir maintenant ! », dira-t-il. Je restai couchée à terre. Un autre militaire voulut m’embarquer mais le gentil lui fit remarquer que moi je respire encore et donc il n’est pas question de m’embarquer dans ce camion. Un militaire du groupe lui dit qu’ils ont reçu "des ordres clairs de violer et tuer aujourd’hui. Il faut exécuter les ordres ".
« Ah bon ? Alors elle, elle ne mourra pas. Celui qui la touche, on meurt tous ensemble ici ! », répondit le militaire qui me protégeait.  J'ai voulus me lever entre temps pour partir. J’étais nue. Le militaire me dit en pular (langue peule) : « attends à côté de moi ici jusqu’à l’arrivée de la croix rouge, si tu ne veux pas mourir ! ». Il me donna mon pantalon et me dit de l’attacher au moins autour de mes reins. J’étais si faible et souffrante que j’étais incapable de porter mon pantalon.
GP :
Comment alors vous êtes-vous retrouvé à Dakar ?
FB :
C’est une ONG qui a recherché et réuni les femmes victimes de viols pour les envoyer à Dakar, avec la collaboration de la Raddho et l’ambassade de France. On est venu le 7 novembre. Parmi nous, on découvrira que deux filles étaient malheureusement tombées enceinte. On nous a d’abord envoyées à Thiès.
GP :
Donc vous êtes prises en charge par cette ONG ?
FB :
Au fait, tout a été organisé par la Raddho avec l’aide financière de l’ambassade de France. A Mermoz (quartier résidentiel de Dakar), c’est la Raddho qui nous a prises en charge pendant 2 semaines, au nombre de 10 femmes. Puis, on nous a envoyées à Castor (quartier populaire de Dakar) où on nous a prises en charge pendant 8 mois. De là, on nous a séparées et moi j’ai été amenée au centre de Bopp (Union pour la solidarité et l’entraide de Bopp). Depuis ce moment, on est resté longtemps sans aide. Nous sommes allées voir Mme Sy qui faisait le contact avec la Raddho au début pour demander de l’aide pour le manger au moins. Notre vie était finalement réduite à ce cycle d’aller quémander quand on ne peut plus et qu’on a plus à manger. La plupart des victimes se sont découragées et se sont retournées en Guinée. C’était d’ailleurs le but recherché par le gouvernement de la transition: donner le sentiment que tout est fini et tout est rentré en ordre. Mais moi je suis malade et suis soumise à un traitement durable ici à Dakar. Je dois me rendre à l’hôpital chaque 3 mois. Je suis donc obligée de rester ici. Ce que certains ne comprennent pas. On est donc 3 femmes restées ici mais les 2 autres ont des parents ici. Et puis c’est mon cas qui est le plus sérieux alors que je n’ai personne ici.
GP :
Où vivez-vous en ce moment ?
FB :
Je n’ai aucun domicile fixe en ce moment. Tantôt, je dors chez des connaissances rencontrées ici. Tantôt c’est sur la terrasse à Grand Dakar (quartier populaire) au dehors que je passe la nuit.
GP :
Mais, attendez ! Vous dites que vous dormez dehors dans cette ville où il y a des Guinéens partout ? Et la Raddho dans tout ça ?
FB :
Depuis que Sékouba Konaté est venu ici avec son gouvernement de transition dont Mme Sy, Tibou Kamara et d’autres pour donner à chaque victime 400 000 FCFA pour prix du transport afin de rentrer en Guinée, selon les termes de Mme Sy qui était ministre, la Raddho s’est désengagée. Elle n’avait d’ailleurs plus de fonds pour nous aider.
GP :
Alors pourquoi ne rentrez-vous pas en Guinée ?
FB :
Vous n’avez pas fait attention à ce que j’ai dit tout à l’heure. Je suis malade moi et je suis sous assistance médicale ici. Et puis, ce journaliste tchadien qui nous avait accueillies au retour de Thiès a été contacté par le PM de la transition Jean Marie Doré à mon sujet. Il a fait des propositions à ce dernier pour qu’il collabore avec eux pour me faire retourner en Guinée, vu que c’est moi qui suis un des témoins clé de ce qui s’est passé au stade le 28 septembre 2009. Ce dernier a refusé en estimant que pour ma survie, il faut que je suive mon traitement ici, parce que certaines victimes avaient disparues des hôpitaux et de la morgue en Guinée. Donc, je trouve cette démarche du PM qui travaillait désormais avec les bourreaux suspect et j’ai peur pour ma vie en Guinée, étant donné que ce sont ces bourreaux qui dirigent encore le pays. Même ici, je ne me sens pas en sécurité pour le manque de moyen et pour la proximité avec la Guinée.
GP :
Cellou Dalein, le leader de votre parti qui était avec vous à la tribune avait presque élu domicile ici, à Dakar. L’avez-vous rencontré pour lui exposer vos problèmes ? A-t-il su que vous dormez dehors ?
FB :
Oui, je suis allé le voir à un moment très dur pour moi. J’avais demandé au tchadien de me prêter 500 FCFA comme transport afin que j’aille voir Cellou à l’hôtel Méridien Président. Je l’ai rassuré qu’à mon retour, je vais lui rendre son argent.
Dès que Cellou m’a vue, il m’a reconnue et demandé si mon état de santé va mieux. J’ai expliqué au leader que nous ne sommes plus prises en charge et qu’on a besoin d’aide. Je lui ai tout dit sur ma situation parce que je n’ai personne qui pourrait m’aider ici de façon durable. Je lui ai demandé aussi de m’aider à avoir un visa pour aller dans un pays où je serais en sécurité et où je suivrai mon traitement, comme aux USA.
Il m’a répondu qu’il ne peut pas m’aider pour le visa mais que si j’arrive à en trouver, il va m’aider pour le billet d’avion. C’est sur ça qu’on s’est quitté.
GP :
Il vous a donc aidé en attendant pour le logement et la nourriture ici !
FB :
Non ! Quand je partais, il a palpé ses poches et m’a dit qu’il n’a rien en ce moment. Il m’a dit de revenir quelques jours après. Mais c’était à l’hôtel Méridien Président, très loin. J’avais utilisé tout ce que j’avais et que j’avais emprunté à cet effet pour venir le voir. Pour le retour, j’ai marché à pieds de là-bas au rond-point des Almadies. J’étais malade, morte de fatigue et endettée. Alors je n’ai plus osé me retourner vers lui. D’ailleurs, deux jours après, j’ai appris qu’il est parti du Sénégal.
GP :
Avez-vous un dernier mot à nous dire ?
FB :
Je voudrais remercier tous les compatriotes qui se battent pour la justice et contre la dictature en Guinée. Je voudrais cependant exprimer ma grande déception de la classe politique et de la société civile guinéenne. De notre malheur, ils ont tous profité pour remplacer ceux qui étaient aux commandes mais rien n’a changé en Guinée. D’ailleurs, ils se sont partagé des postes et de l’argent sans plus penser aux victimes et à leurs familles. On a vu des leaders politiques bien portant se dédommager eux-mêmes en hauteur de 2 000 000 000 FG chacun pour les événements du 28 septembre sans mot ni soutien aux femmes victimes de ce jour.
(Précision: c’est Jean Marie Doré, Sidiya Touré et Cellou Dalein Diallo qui ont reçu cette somme en question).
Le pire des crimes a été commis contre les populations en octobre sans que le gouvernement issu des forces vives ni Rabiatou ou les syndicats ne disent mot. 5 nouvelles femmes violées à Labé viendront s’ajouter à nous parmi lesquelles une en grossesse de 5 mois et violée dans cet état, et une autre avec la jambe totalement brisée après avoir été violée. Mais ni le gouvernement ni le CNT des forces vives ni les partis politiques n’en ont fait un problème au point que ces faits sont restés inconnus du grand public. On nous a toutes abandonnées ici et finalement, le gouvernement de transition nous considérait comme gênant pour la Guinée et n’a cherché qu’à nous faire rentrer au pays sous le contrôle de nos bourreaux restés ministres et devenus leurs amis.
Les 5 femmes victimes de 2010 ont bénéficié de l’aide de certains compatriotes ici à Dakar dont un qui a été lui-même victime des violences de septembre 2009 en Guinée et aussi grâce à un montant collecté à l’extérieur.
(N.B : d’après nos informations, c’est un certain Oury Diallo qui a reçu ces 5 femmes violées de Labé chez lui dans son salon. Pour les aides financières, Alpha Amadou Baldé, le fils d’Elhadj Ousmane Sans Loi aurait beaucoup fait à titre personnel et pour des raisons purement humanitaires.
La Raddhonous a expliqué que pour les 5 femmes violées en octobre 2010, elle avait fait une demande d’aide pour leurs soins et restauration auprès de l’OMCT (Organisation Mondiale Contre la Torture) après les avoir rencontrées et vu leurs états graves mais qu’au moment où elle recevait le fonds, ces femmes et ceux qui les aidaient avaient décidé qu’elles rentrent en Guinée. Ces dernières ont donc été retournées au pays sans bénéficier des soins prévus par la Raddho, y compris la femme enceinte de 5 mois. Nous avons parlé personnellement avec le Président Tine et la Directrice financière Mme Ndaye Daba Faye de la Raddho).
GP :
Je vous remercie Mlle Barry pour cette interview !
FB :
C’est à moi de vous remercier, Monsieur !
Interview réalisée par GuinneePresse.Info à Dakar, le 25 septembre 2011''

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  1. Je suis choqué par cette itw!
    je suis guinéen et j'ai vraiment honte pour moi et mon pays.
    Je n'ai jamais aimé la politique et ses acteurs, aujourd'hui encore moins.
    Pire, quand ceux qui veulent faire de la politique ne sont que des ignorants du sens du mot "politique", ça ne peut que semer des souffrances comme ce que traverse cette jeune femme!

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