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Posted by : Palabre-Infos 27 déc. 2010

Bangaly Camara
Nous voulons changer la Guinée? alors optons pour des changements de fond, qui puissent servir le pays à moyen et long terme et au bénéfice de tous les citoyens. Telle est ma vision.
Des étudiants guinéens arrivent chaque année par centaines dans l’hexagone, des jeunes filles et des jeunes hommes, par le billet de la coopération franco-guinéenne, qui offre depuis quelques années la chance aux jeunes guinéens de poursuivre leurs études supérieures en France, même si parfois les conditions financières sont difficiles.
Parmi eux des fils de hauts fonctionnaires de l’administration guinéenne, qui à travers leurs parents ont toujours profité des biens de ce pays et vont continuer à en profiter ici durant leurs années d’études. Mais c’est aussi en grande majorité des fils d’enseignants dont nous connaissons tous les conditions de vie en Guinée, de petits commerçants, de paysans, d’illettrés,…pour lesquels ce voyage est la seule échappatoire pour l’accès à une formation de qualité. C’est de ces dernières catégories d’étudiants dont je vous parlerai.
Une fois à l’aéroport Charles De Gaulle de Paris, ils sont tout de suite confrontés à la dure réalité de la vie en France. Pour la plupart, ils n’ont aucune famille en France. Ils font généralement leurs premiers pas aux côtés de jeunes étudiants déjà sur place, des personnes qu’ils ont connus en Guinée ou qui leur ont été recommandés par des connaissances ou encore qu’ils rencontrent par le billet des associations guinéennes sur place (qui font un travail formidable pour accueillir et aider à leur l’intégration). Après quelques semaines, pour certains et quelques mois d’autres, leurs poches sont vides. Il n'y a plus d’argent. Ils doivent alors trouver au plus vite un travail pour subvenir à leurs besoins: payer le loyer et les frais de scolarité, se nourrir, s’habiller, payer le transport,... noyer au fond de toute cette inquiétude, ils doivent aller à l’école pour y suivre des cours dont la compréhension nécessite une bonne présence mentale. La tension monte et certains commencent à se poser des questions: « est ce que je dois aller en cours ou est ce que je dois aller chercher du travail vu toutes les dépenses qui m’attendent? Si je ne paye pas mon loyer je risque de me retrouver dehors,… »Quand on doit manger, dormir au chaud,…et qu’on a personne sur qui compter pour une aide financière, le choix est très vite fait. Ils quittent les cours et vont chercher du travail. Avec la crise économique qui frappe le monde actuellement, les petits boulots pour étudiants deviennent de plus en plus rare, malgré cette conjoncture, certains en trouve facilement, d’autres cherchent plus longtemps, d’autres n’en trouvent pas tout.
Ensuite ils doivent concilier ce travail avec les études. Entre la fatigue que génère le travail, l’isolement sociale, la nostalgie de la famille et du cadre social d’antan. L’université (de 8h à 18h la plupart du temps), le boulot (pour le reste de la soirée), la cuisine au retour à la maison parce que leurs ressources financières sont limitées au point même de ne pas pouvoir se payer un repas au restaurant universitaire (2,80) durant la semaine. Tel est le schéma de vie de ces jeunes. Dans cette douleur psychologique, certains finissent par abandonner et empruntent d’autres chemins. D’autres s’accrochent malgré les échecs répétés. In fine, certains arrivent à décrocher un, voir plusieurs diplômes.
Après les études, certains trouvent du travail et décident de rester en France, en tout cas pour plusieurs années, d’autres décident de rentrer pour apporter au pays leur modeste savoir, certains ne trouvent pas de travail professionnel et restent tout simplement en France à faire des petits boulots pour survivre. Ceux qui rentrent en Guinée, une petite minorité, par leur compétence et leur savoir faire, y sont généralement perçus comme des dangers par les opportunistes qui ont condamné le pays des années durant aux clientélistes et à la corruption. Leur insertion professionnelle y est très difficile. Alors le combat continue. Après toutes ces années vécues comme s’ils n’avaient pas de patrie parce que abandonnés par la Guinée, par leur patriotisme et le leur souci pour le devenir de la guinée, ils rentrent pour la servir, mais ils n’en ont pas la possibilité. Tout au long de leur parcours d’étudiant, qui a été pour eux un rude combat de tous les jours, ils ont des amis Sénégalais et Maliens qui se la coulent douce. L’exemple des étudiants Maliens qui ont une bourse d’étude d’un montant suffisant pour subvenir à leurs besoins et leur offrir le confort nécessaire à la vie d’un étudiant. Et pourtant le Mali ne se vante pas d’être un scandale géologique,…Il est plus connu pour être un désert, mais il offre à ses étudiants une condition de vie digne facilitant leur poursuite d’études en France.
Malgré toutes ces difficultés ces jeunes combattants guinéens à la recherche du savoir arrivent à s’en sortir de façon honorable. Une minorité. Ce qui me fait mal au cœur, me désole profondément et que je trouve inacceptable, c’est tous ces étudiants qui ont toutes les potentialités intellectuelles, la motivation nécessaire et l’envie d’y arriver mais qui abandonnent parce qu’ils se retrouvent dans des difficultés financières extrêmes. Toute cette matière grise qui se voit gaspillée alors que nous en avons tellement besoin! La décision d’abandonner est généralement difficile et pénible pour eux mais ils la prennent, parce qu’ils ne trouvent pas d’autres recours.
C’est là que je situe votre rôle Monsieur le Président. Ceci n’est qu’une description très succincte de leurs parcours de combattants à la recherche du savoir, je vous épargne des détails. Il est d’ailleurs inutile de vous raconter tout ça, depuis l’âge de 15ans vous avez vécu en France, peut être pas dans les mêmes conditions mais étant un homme d’état, un leader, je suis sûr que vous avez dû observer autour de vous tous ces étudiants. Monsieur le Président, chaque citoyen est lié par un contrat avec la nation à laquelle il appartient. Il a des droits inaliénables qu’il doit recevoir de son pays, en retour, il a des devoirs envers ce pays. En ce qui concerne ces jeunes, vous et votre administration avez le devoir de vous occuper de leur éducation, de leur ouvrir ensuite des perspectives pour l’accès à l’emploi. Mais depuis plusieurs années, ces jeunes partent par milliers sous le regard indifférent de nos dirigeants. Ils ne bénéficient d’aucun suivi. L’état ne sait même pas qui est parti et qu’est ce qu’il a pu devenir, et pourtant ces jeunes sont aussi des fils de ce pays. Aujourd’hui ils sont des centaines de diplômés qui errent à travers la France et des milliers à travers le monde. Mais la Guinée ne profite point de toutes ces compétences. Je pense que vous conviendrez avec moi sur le fait que l’avenir d’un pays repose sur sa jeunesse. Et si tous ces jeunes partent, parce que abandonnés par leur dirigeants, que deviendra la Guinée? C’est une perte inestimable pour nous. J’en appelle à votre responsabilité vis-à-vis de ces jeunes, à votre sens du devoir Monsieur le Président, je ne doute point de votre personnalité. Accordez à ces jeunes des BOURSES D’ETUDES, qui peuvent être des bourses de mérite et sur critère social, démarquez-vous, offrez leur le suivi nécessaire à leur réussite et offrez leur une chance de servir la Guinée en cultivant le mérite. Ces bourses pourraient même dans certaines conditions êtres payées par les pays qui les accueillent, après signature d’accords entre les deux états et parfois avec les universités dans le cadre de thèses de doctorat. En suivant bien ces jeunes, vous pourrez leur proposer des orientations dans des domaines d’études selon les besoins de notre pays. Ce qui pourrait également faciliter leur insertion professionnelle à la fin des études.
En tout cas ils sont étonnés et se demandent constamment pourquoi cette indifférence, et cela depuis toutes ces années.
Ma promotion est en fin de cycle, nous n’allons pas profiter de ces bourses, mais nous sommes tous unanimes sans aucune exception sur le fait que le plus important est que nos jeunes frères et nos jeunes sœurs qui viendront les prochaines années ne connaissent pas les difficultés que nous avons vécues, qu’ils ne soient pas obligés de faire certains choix d’erreur que nous avons faits, qu’ils puissent faire leurs études dans des conditions normales, qu’ils se précipitent de rentrer en guinée après leur cycle parce qu’ils ont été soutenus , se sont sentis fils d’un pays dont ils sont fiers. Tout n’est pas une question d’argent, mais quand à leurs formations de base ratées à cause de la mauvaise qualité du système éducatif guinéen viennent s’ajouter des soucis financiers, la situation s’empire. Il faut noter également que les insuffisances de ressources financières arrivent à déstabiliser même ceux qui avaient un niveau excellent. Alors, il faut agir à deux niveaux: leur assurer un bon enseignement de base(en Guinée) et un accompagnement dans leurs cheminements (dans l’hexagone ou ailleurs en accordant des bourses d’étude).
Nous sommes persuadés que l’implication de l’état dans l’encadrement de ces jeunes va accroitre considérablement le taux de réussite et leur permettra d’explorer d’autres horizons.
Le conseil national des associations de jeunes guinéens en France(CNJGF) pourrait être un bon outil pour le ministère de l’enseignement supérieur pour aider à faire un état des lieux .Le leurre à longtemps durée, il serait salutaire Monsieur le Président de mettre en place une commission de travail qui se penchera sur cette question.
Monsieur le Président, ils sont des centaines et avec le changement que vous promettez, il renaît en eux un espoir qui s’était éteint depuis longtemps.

Pour la jeunesse Guinéenne

Bangaly CAMARA
E-mail :benghaly@hotmail.fr

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