2 avr. 2011
"Les Grandes Gueules", c’est le nom d’une émission de la radio privée Espace FM. Ces derniers temps, ce programme s’est véritablement imposé dans les cœurs des auditeurs qui le suivent tous les matins dès après le flash de 9 heures. Elle se caractérise par une certaine audace et par une liberté de ton sans précédent dans les médias guinéens. C’est donc à cause de cette émission que « la radio officielle de la jeunesse » vient d’être frappée d’un avertissement dûment signé par Madame Martine I. Condé, présidente du Conseil National de la Communication...
Lu sur guineeconakry.info
Ce sont les médias publics qui ont diffusé la décision le jeudi 31 mars, dans la soirée. Après la suspension suivie du règlement à l’amiable du différend qui menaçait l’existence de la radio communautaire Familia FM et la fermeture définitive du cyber de la presse au sein du CNC, on se demande si les rapports entre les autorités et les médias ne risquent pas de se gâter.
Or, on ne peut parler d’institutions démocratiques sans parler de liberté de la presse et d’expression ainsi que de la liberté et de la pluralité des opinions. Le Conseil national de la communication n’a pas pour unique mandat de veiller, comme on le dit souvent, "au respect par les médias de l’éthique et de la déontologie du travail journaliste". Cette institution doit aussi, aux besoins, se poser en défenseur des organes de presse. Ce qui est plutôt rare.
Ceci dit, dans le cas de l’avertissement que le CNC a adressé à Espace FM, il faut oser dire que les concepteurs et les animateurs des "Grandes Gueules" doivent mettre à profit ce signal qui leur est envoyé pour se remettre objectivement en cause. Il ne faudrait qu’ils sachent que si l’esprit de l’émission est à saluer, à encourager et à promouvoir, les formes n’y sont pas toujours. S’ils ne font pas preuve de responsabilité et n’abordent pas les sujets sans passion, ils risquent de légitimer une prochaine suspension de l’idée géniale que sont "Les Grandes Gueules".
De nombreux observateurs trouvent que dans cette émission les choses sont abordées avec une certaine légèreté et que les animateurs font quelquefois dans une vulgarité qui frise même l’insolence et l’atteinte à la dignité de certains interlocuteurs. Conakry n'est pas Paris. Les mots ici ou alleurs prennent toujours des connotations culturelles. Les mêmes observateurs déplorent par ailleurs le manque de spécialisation et surtout, quelques fois une absence manifeste de préparation et de sérieux en amont de la diffusion de l’émission.
L’idéal aurait été de réunir le maximum de documents et d’informations sur les sujets qui sont abordés. Ce qui n’est souvent pas le cas. L'argumentaire des journalistes devraient mieux soutenus, tout en évitant strictement les jugements de valeurs. Retenons que la volonté si grande soit-elle, à elle seule, ne suffit pas. Il faut y ajouter une certaine dose de conviction, de compétence et de responsabilité. Il faut bien répéter que l’idée et l’esprit sont hautement nobles. Il faudra alors se munir des armes nécessaires pour les faire triompher.
Sinon, "Les Grandes Gueules" seront une cible facile pour les autorités qui, de toutes les façons, ne voudront pas qu’on fouille dans leur gestion. Alors, il ne faudra point prêter le flanc à la facilité ou tomber sous le charme des admirateurs. Comme dit une annonce publicitaire qui passe très souvent sur la même radio: "on peut être jeune et responsable".
Un message comme celui-là ne s’adresse pas qu’autres. Courage donc !
Pivi Bilivogui pour GuineeConakry.info
